Pacte d’actionnaires – mise en garde sur les rédactions imprécises

Par une récente décision, la Cour de cassation est venue rappeler l’importance de rédiger son pacte d’actionnaires avec attention.

En l’occurrence un pacte d’actionnaires a été conclu entre un salarié entrant au capital de la société l’employant et les autres associés de cette société. Ce pacte prévoyait, comme il est usuel, une promesse de cession de ses titres en cas de départ (pour licenciement, révocation ou démission). La promesse en question prévoyait un plafonnement du prix de cession des titres au montant du prix d’acquisition lorsque le départ se déroulait dans les 24 mois suivant l’entrée au capital. En outre, ce pacte a été conclu pour une durée expirant en 2088, soit un engagement de 76 ans pour le salarié entré au capital en 2013.

Contestant l’obligation de céder qui le liait par l’intermédiaire du pacte d’associés, le salarié a recherché :

  • la nullité du pacte pour contrariété à la règle de prohibition des engagements perpétuels et,
  • la nullité de la promesse de cession pour indétermination du prix de cession.

 

Sur la nullité du pacte pour prohibition aux engagements perpétuels :

La Cour de cassation, sans se prononcer sur la durée elle-même du pacte d’associés, précise qu’un engagement perpétuel ne peut être sanctionné par la nullité. Il est possible pour le cocontractant d’y mettre fin moyennant le respect d’un préavis. Cette jurisprudence (affaire antérieure à la réforme du droit des contrats) est conforme à la nouvelle rédaction de l’article 1210 du Code civil issu de l’ordonnance du 10 février 2016 et permet de mettre fin aux divergences jurisprudentielles sur la sanction applicable. Il convient à ce titre de rappeler l’importance de rédiger avec précaution la clause sur la durée d’application du pacte pour éviter tout désengagement ultérieur et facile d’un associé au pacte qui le lie.

Sur la nullité de la promesse de cession pour indétermination du prix de cession :

La Cour de cassation rappelle qu’une promesse de cession doit prévoir un prix déterminé ou déterminable (notamment au regard d’une formule de calcul du prix) sans dépendre de la seule volonté d’une des parties ni d’un accord ultérieur entre elles. A cet égard, elle indique qu’il ne peut être déduit d’une clause limitant le prix de cession à un prix plafond que le prix était déterminable. Il convient en conséquence de regarder si la promesse de cession organisait une méthode de calcul permettant de déterminer un prix de cession qui viendrait ensuite être plafonné par la clause de limitation du prix de cession. Il est par voie de conséquence important de bien penser à ces mécanismes avant d’organiser un prix plafond dans les promesses de cession.

(Cour de cassation, chambre commerciale 21.09.2022, n°20-16.994)

Claire MELIQUE