La possible renonciation à l’agrément par les héritiers d’un associé décédé en SARL

Par une décision en date du 24 janvier dernier, la Cour de cassation a affirmé pour la première fois que l’héritier peut, à tout moment, renoncer à sa demande d’agrément et exiger le remboursement de la valeur des droits sociaux de son auteur.

Les faits étaient les suivants : un associé de SARL décède, et laisse pour lui succéder deux héritières. Une procédure de demande d’agrément auprès des associés survivants de la société se met en œuvre conformément aux statuts de la société. Les associés ayant refusé l’agrément, un expert a été nommé pour arrêter la valeur des parts. La cession ne se réalise pas dans le délai légal et statutaire imparti. A l’expiration dudit délai, les héritières sollicitent en justice le rachat forcé des parts sociales de leur auteur.

Appliquant le principe prévu par l’article L.223-14 du Code de commerce, la Cour d’appel considère l’agrément acquis, les parts sociales n’ayant pas été rachetées par les associés ou par la société dans le délai de 3 mois, si bien que les héritières ne pouvaient pas solliciter en justice le rachat forcé des parts sociales.

Les héritières ont alors saisi la Cour de cassation.

La Cour de cassation émet une position contraire à la Cour d’appel en se fondant de manière très étonnante sur la combinaison des articles L.223-13 du Code de commerce et L.223-14 alinéa 3 du Code de commerce, qui prévoient respectivement que :

  • « les statuts peuvent stipuler qu’en cas de décès de l’un des associés la société continuera avec son héritier ou seulement avec les associés survivants. Lorsque la société continue avec les seuls associés survivants, ou lorsque l’agrément a été refusé à l’héritier, celui-ci a droit à la valeur des droits sociaux de son auteur » (article L.223-13 de Code de commerce) ;
  • si l’agrément a été refusé, « les associés sont tenus, dans le délai de trois mois à compter de ce refus, d’acquérir ou de faire acquérir les parts à un prix fixé dans les conditions prévues à l’article 1843-4 du code civil, sauf si le cédant renonce à la cession de ses parts » (article L.223-14 al 3 du Code de commerce).

La Cour de cassation affirme ainsi que l’héritier peut, à tout moment, même après fixation du prix par un expert, renoncer à sa demande d’agrément et exiger le remboursement de la valeur de ses droits. Cette décision contraint alors les associés survivants de la société, qui n’ont plus d’autre choix que de procéder ou de faire procéder au rachat des parts sociales.

Cette position est surprenante en ce qu’elle confère une possibilité aux héritiers de renoncer à un droit qui ne leur appartient pas.

A voir dans l’avenir si une telle position se maintient.