Dommage futur et garantie décennale

Rappelons que les constructeurs sont tenus envers le maître ou l’acquéreur de l’ouvrage, pendant dix ans à compter de la réception, des dommages qui compromettent la solidité de l’ouvrage ou qui, l’affectant dans l’un de ses éléments constitutifs ou l’un de ses éléments d’équipement, le rendent impropre à sa destination.

Ce délai de dix ans est qualifié de délai d’épreuve et de délai d’action, c’est-à-dire que le dommage de nature « décennale » doit survenir dans le délai, et le maître d’ouvrage doit également agir dans ce même délai (par exemple par une assignation interrompant la prescription).

Le dommage futur est celui qui va survenir de façon certaine, dans sa gravité décennale, dans le futur. Selon la jurisprudence de la Cour de Cassation, il est réparable sur le fondement de la garantie décennale à deux conditions : il doit être dénoncé dans le délai décennal et être de gravité décennale dans le même délai.

Au cas d’espèce, le maître d’ouvrage ayant fait réaliser des travaux de charpente, recherchait la responsabilité décennale de l’entreprise en raison de la présence de champignons lignivores et du sous-dimensionnement de la charpente. Les juges du fond ont considéré que le postulat selon lequel le plancher ne pourrait supporter une charge utile de 250 kg/m2 sans que des désordres n’apparaissent, relevait d’un risque théorique. Il a donc été considéré que le maître d’ouvrage ne rapportait pas la preuve d’une atteinte à la solidité ou une impropriété à destination apparue dans le délai décennal.

La Cour de cassation a rejeté le pourvoi, rappelant que l’appréciation du critère de gravité décennale est une question de fait qui relève du libre pouvoir d’appréciation des juges du fond.

Cass. Civ. 3ème, 30 novembre 2022, n° 21-23.097