L’usufruitier ayant fait réaliser des travaux affectés de désordres peut-il agir sur le fondement de la garantie décennale due par les constructeurs ?

Par un arrêt du 16 novembre, la Cour de cassation répond par la négative : l’usufruitier n’étant pas le propriétaire de l’ouvrage (même s’il est titulaire du droit de jouir de la chose comme un propriétaire), il ne peut pas exercer l’action en garante décennale que la Loi attache à la propriété de l’ouvrage et non à sa jouissance.

La Cour de cassation précise toutefois que l’usufruitier peut en revanche agir sur le fondement de la responsabilité contractuelle de droit commun en réparation des dommages que lui cause la mauvaise exécution des marchés de travaux.

Les deux régimes de responsabilité présentent cependant une différence importante :

  • la garantie décennale est une responsabilité de plein droit ; dès lors qu’un dommage affecte l’ouvrage, les constructeurs en sont responsables (sauf force majeure ou cause étrangère) sans avoir à prouver leurs fautes ;
  • à l’inverse, la responsabilité contractuelle de droit commune suppose de rapporter la preuve d’une faute du constructeur pour voir sa responsabilité engagée.

L’usufruitier est donc dans une situation moins avantageuse que le nu-propriétaire ou le propriétaire en cas de dommages affectant l’ouvrage objet de travaux de construction.

En cas de démembrement de propriété, il est donc recommandé que ce soit le nu-propriétaire qui soit maître d’ouvrage des travaux, lequel pourra rechercher la garantie décennale des constructeurs en cas de dommages affectant l’ouvrage.

Cour de cassation, 3ème Chambre civile, 16 novembre 2022, n°21-23.505

Elise Prigent