Construction : L’assurance dommages-ouvrage avant réception, c’est possible ? oui … mais !

L’assurance dommages-ouvrage est souscrite par le maître de l’ouvrage et vise à le couvrir, en dehors de toute recherche de responsabilité, du paiement des travaux nécessaires à la réparation des dommages de nature décennale.
v L’assurance dommages-ouvrage a ainsi pour vocation de préfinancer les travaux nécessaires, à charge pour elle de se retourner vers les assureurs de responsabilité décennale des constructeurs.

Le régime de cette assurance est détaillé à l’article L 242-1 du Code des Assurances qui précise qu’elle prend effet après l’expiration du délai de garantie de parfait achèvement (un an après la réception).

L’article précise qu’elle garantit également le paiement des réparations nécessaires lorsque :

–       Après la réception, après mise en demeure restée infructueuse, l’entrepreneur n’a pas exécuté ses obligations ; –       Avant la réception, après mise en demeure restée infructueuse, le contrat de louage d’ouvrage conclu avec l’entrepreneur est résilié pour inexécution, par celui-ci, de ses obligations. La Cour de Cassation vient de rappeler ces deux conditions de mise en œuvre de l’assurance dommages-ouvrage avant réception.

Au cas d’espèce, le maître d’ouvrage a notifié à une entreprise la résiliation de son marché pour manquement à ses obligations contractuelles. Cette société a ensuite été placée en liquidation judiciaire. Se plaignant de désordres, le maître d’ouvrage a recherché la garantie de l’assureur dommages-ouvrage.

Dans un arrêt du 18 juin 2021, la Cour d’Appel de Colmar a considéré que le maître d’ouvrage ne pouvait solliciter la garantie de l’assureur dommages-ouvrage faute de pouvoir justifier d’une mise en demeure de l’entrepreneur préalablement à la résiliation du contrat.

La Cour de Cassation a validé cette analyse en rejetant le pourvoi, soulignant « En application de l’article L. 242-1 du Code des assurances, la garantie de l’assureur dommages-ouvrage n’est due, pour les dommages survenus avant réception de la nature dont sont responsables les constructeurs sur le fondement de l’article 1792 du Code civil, que si, après mise en demeure restée infructueuse, le contrat d’entreprise conclu avec l’entrepreneur est résilié pour l’inexécution, par celui-ci, de ses obligations ».

La Cour de Cassation précise dans son arrêt que « Le maître d’ouvrage ne peut se dispenser de cette formalité que quand elle s’avère impossible ou inutile, notamment en cas de cessation de l’activité de l’entreprise ou de liquidation judiciaire emportant résiliation du contrat de louage d’ouvrage ».

Tel n’était pas le cas en l’espèce puisque la résiliation du contrat de louage d’ouvrage avait été notifié plusieurs mois avant la liquidation judiciaire.

Il est également intéressant de relever que, dans cette affaire, le maître d’ouvrage se prévalait des mises en demeure adressées précédemment par le maître d’œuvre à l’entrepreneur. Les juges du fond ont toutefois retenu que le maître d’œuvre n’était pas titulaire d’un mandat donné par le maître d’ouvrage pour mettre en demeure les constructeurs en son nom, avant une éventuelle résiliation du contrat.

Cass. civ. 3, 7 septembre 2022, n° 21-21.382